L’étude de l’origine des noms de famille en Béarn passe donc majoritairement par une recherche sur l’origine des noms de maison. Comment ces toponymes, constitutifs de nombreux patronymes étaient-ils choisis ? Quelles étaient leur signification ?

L’archiviste et historien Régis de Saint-Jouan a entrepris de répondre à cette question au milieu du XXème siècle : l’étymologie des noms de maison est à rechercher principalement dans les caractéristiques d’une maison-souche. Son emplacement géographique, la nature de son terrain, sa qualité, son orientation, la proximité avec un cours d’eau ; mais aussi par rapport à sa fonction, son rôle au sein de la communauté de voisins, et plus rarement par la fonction de ses habitants. Le nom de maison, lorsqu’il se constitue, est unique au sein du village ou de la communauté, et doit parfois être compris au second, voir au troisième degré.

Volet 2 - Attribution et signification

Beaucoup de patronymes béarnais ont pour étymologie le bâtiment même de la maison-souche. C’est le cas des Maysonnave et Cazenave (maison neuve), Loustalot (petit ostaü), Cazamayou (maison la plus importante), Casalongue (grande maison), Casavieille. Les noms de lieux entourant la maison-souche reprennent ensuite les éléments accessoires à la maison comme la grange qui donnera Laborde, Bordenave (grange-neuve) ; le jardin-potager qui donnera Casau, Casaubielh ; les champs qui donneront Camborde (champ de la grange), Courrèges (champs étroits et longs en forme de courroie).

Viennent ensuite des noms reprenant l’environnement de la maison d’origine, comme un bois qui donnera les géo-patronymes Bosc, Bousquet, Lucq (bois sacré) ; un cours d’eau qui donnera Arriu (ruisseau), Larribet (petit ruisseau), Darrigrand (grand ruisseau) ou Barats (fossé). Les ressources exploitées par la communauté telles que les arbres et végétaux donneront : Cassou (le chêne), Mesplé, Mesplède (le néflier), Péré (le poirier).

Les noms donnés aux maisons reprennent également une caractéristique géographique. Une maison établie sur une crête donnera Serres ou Lasserre, et dans une vallée : Baigt. Située au carrefour, à la fourche, elle s’appellera Hourcade, Forcade, Lafourcade. Sur ou près d’un monticule, d’une hauteur : Poey, Puyo, Pujol, ou Trespoey (au-delà du poey). Pour un beau point de vue : Mirande, Lasbistes, Bellocq (bel endroit en général).

Le nom d’un lieu peut aussi venir de son orientation par rapport à sa maison d’origine. Au-dessus et vers le Sud : Casassus ou Soubirou ; au-dessous et vers le Nord : Labat, Debat, Juzon. Vers l’Est : Daban, Cazaban. Vers l’Ouest : Capdarré, Ladarré. Au-dessus du chemin : Soubie, Souberbie. Le nom de maison peut également indiquer un bornage comme Capdevielle (au bout du village), Pédelabat (au début de la vallée), Lafitte, Lahitte (au plus haut), Lamarque (délimitant un quartier, un lieu-dit).

                S’y ajoutent les noms indiquant la nature de la terre bonne ou mauvaise comme Broca (buissons épineux, ajoncs, bruyère), ou Salhet (endroit humide où abondent les saules, généralement au bord des gaves). Dans un endroit déshérité : on choisira Hourtic pour un lieu envahi d’orties, Caubios pour une terre avec peu de végétation, Trouilh pour un endroit marécageux, ou Junca pour une jonchaie. Pour de bonnes terres : Ladaurade (terre dorée, soit de bonne qualité), Lau, Dulau, (étendue de terres labourables).

Enfin certaines maisons porteront des noms de métiers, signalant l’importance d’une fonction au sein d’une communauté. Les plus nombreux se rapportent au métier de forgeron : Faure, Lafargue. Quant aux maisons nobles ou bourgeoises, elles donneront Doumerc, Domengue, Lassalle, Salles, Salanave (maison forte neuve), Marquèze (marquise), Bayle (représentant local du vicomte) ou encore Magendie (percepteur du droit de magesque taxant les cabaretiers).

Une fois attribué, le nom de maison en Béarn s’imposait à tous, ses règles de dévolution étaient codifiées par la coutume béarnaise comme nous le découvrirons dans notre dernier volet.

Sources bibliographiques et références :

  • Saint-Jouan Régis de. Le nom de famille en Béarn et ses origines. In: Revue Internationale d’Onomastique, N°1-12, 1950, 1951, 1952.
  • Michel Grosclaude, Dictionnaire étymologique des Noms de Famille gascons. In: Nouvelle revue d’onomastique, n°21-22, 1993.
  • Dutech Hubert, Dictionnaire des vallées et du piémont béarnais, 2018
  • Dictionnaire béarnais ancien et moderne, par Vastin Lespy & Paul Raymond (1887)

 

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